C’est une nouvelle taxe qui est loin de faire consensus. L’Assemblée Nationale a voté vendredi matin une surtaxe des bureaux situés dans plusieurs arrondissements de Paris, certaines villes des Hauts-de-Seine et à La Défense pour financer les travaux du Grand Paris Express.
L’amendement du député Les Républicains Gilles Carrez (Val-de-Marne) cosigné par le rapporteur général Joël Giraud (La République En Marche) a été adopté par vingt-six voix contre dix-huit, et sept abstentions, dans le cadre de l’examen du projet de budget 2020.
Il prévoit la création d’une zone « premium » dans neuf arrondissements de Paris (1er, 2e, 7e, 8e, 9e, 10e, 15e, 16e et 17e) et six villes des Hauts-de-Seine (Boulogne-Billancourt, Courbevoie, Puteaux, Issy-les-Moulineaux, Neuilly-sur-Seine et Levallois-Perret) et donc le quartier de La Défense. Cette surtaxe de 20 % fait désormais passer cette « taxe bureaux » annuelle de 19,31 à 23,18 euros au mètre carré pour le tarif normal et de 9,59 à 11,51 euros pour le tarif réduit.
Une augmentation « tout à fait absorbable » pour les entreprises selon le gouvernement
« Nous avons la volonté d’assurer le financement de la société du Grand Paris. C’est une entreprise difficile avec des projets importants », a justifié le secrétaire d’État Olivier Dussopt (Comptes publics). « Cette taxe représentera une augmentation du loyer hors charges d’un peu moins de 1 % », a-t-il ajouté, expliquant que l’observatoire de l’immobilier de l’Ile-de-France l’a jugée « tout à fait absorbable ».
Cette nouvelle surtaxe a divisé au sein même des Républicains, dont Gilles Carrez, l’instigateur fait partie. « Je m’élève contre cet amendement qui créé une zone premium, un découpage ad hoc, pour le moins surprenant. C’est pas une zone privilège, sauf à penser qu’être surtaxé et de connaitre année après année des hausses est un privilège », a déclaré la député (LR) Constance Le Grip (circonscription de Puteaux et Neuilly) tout en s’interrogeant sur le risque d’« inconstitutionnalité » de cette mesure.
Soutenu par le gouvernement, cette surtaxe a également fractionné du côté de LREM dont la députée parisienne Olivia Grégoire qui n’a pas caché « sa relative incompréhension » disant que les entreprises parisiennes et franciliennes ont été assez difficilement informées de l’organisation du Grand Paris.
La question du financement du Grand Paris à l’origine de cette nouvelle taxe
« C’est un mauvais signal adressé aux entreprises des Hauts-de-Seine pour lesquels la taxe a déjà été augmentée de 10 % en 2019 dans le dernier projet de Loi de Finance. A l’heure du Brexit où ces villes des Hauts-de-Seine se battent pour attirer les entreprises londoniennes face à une concurrence forte de Frankfort ou Amsterdam, c’est donc un mauvais signal. Les entreprises sont d’accord pour financer le Grand Paris Express mais encore faudrait-il que ces lignes existent », a déclaré pour sa part Isabelle Florennes, député MoDem de la quatrième circonscription des Hauts-de-Seine. Stéphane Peu, député PCF de Saint-Denis a lui jugé cette nouvelle surtaxe comme étant une « justice fiscale »
Car c’est bien la question du financement du Grand Paris Express qui a suscité les débats dans l’hémicycle. « Le problème c’est que la Société du Grand Paris n’est pas complètement financée et tous les ans on nous ressort un amendement pour dire qu’il manque de l’argent et il faut en rajouter un peu », a estimé l’ancien socialiste François Pupponi, désormais sans étiquette. « L’année dernière nous avons déjà parlé de tout ça en augmentant la taxe sur les bureaux et les parkings pour la SGP. Pourquoi revenir cette année sur ce sujet. Les difficultés de financement de la SGP étaient déjà connues l’année dernière. Y revenir est une erreur. Ça révèle une source d’instabilité fiscale », s’est exprimé Éric Woerth, le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.
Cet amendement avait aussi hérissé les poils du président du conseil général des Hauts-de-Seine et de Paris La Défense, Patrick Devedjian (LR) qui a dénoncé « un véritable coup de poignard dans le dos de La Défense » en plein Brexit. Un avis partagé par Marie-Célie Guillaume, la directrice de Paris La Défense qui s’est exprimée sur Twitter : « Tous les ans une nouvelle taxe ! L’instabilité fiscale et la surfiscalité sont deux des principaux freins à l’investissement international en France. On se donne du mal pour attirer les entreprises… mais on n’est vraiment pas aidé ! ».