C’est une tempête que personne n’a oublié. Au lendemain de Noël et alors que le monde s’apprête à célébrer le passage vers le nouveau millénaire, la France est balayée coup sur coup par deux tempêtes d’une ampleur inédite. La première se nomme Lothar et frappe le nord de l’hexagone d’Ouest en Est au petit matin du 26 décembre 1999. Martin, la seconde touche le lendemain en fin de journée également d’Ouest en Est le pays en son centre. Ces deux cyclones extratropicaux de type bombe extrêmement puissants ont causé en quelques heures 140 morts en Europe dont 92 en France et entraîné 19,2 milliards de dollars (2006) de dommages matériels pour les pays européens.
Il est 2 heures du matin quand Lothar touche les côtes bretonnes avec des vents de 148 km/h. Si la tempête faiblit légèrement avec des vents à 126 km/h quand elle atteint Rennes, elle va redoubler d’intensité à l’approche de la capitale. A 7 heures Paris et sa région sont balayées par des vents de 169 km/h.
En plein dans le trajet de cette dépression monstre, qui n’est contrairement aux idées reçues pas un ouragan, le quartier d’affaires de La Défense subit de plein fouet les foudres de Lothar. Au réveil les habitants constatent avec stupeur l’étendue des ravages. Grues à terre, vitres explosées, marché de Noël dévasté, panneaux renversés,… La Défense offre un paysage de désolation.
Deux grues à terre, des chalets détruits et des vitres brisées
Les chantiers du quartier d’affaires sont durement touchés. En pleine construction, Cœur Défense, le plus grand ensemble immobilier d’Europe perd l’une de ses nombreuses grues. L’immense engin métallique ne résiste pas à ces vents violents et s’effondre de sa base sur la résidence Lorraine. Une chute qui terrorise les habitants de cette résidence HLM. « Personne ne pouvait rien faire et finalement elle est tombée, explique en pleurs au micro de France 3, une sinistrée. Notre appartement est complètement bousillé et heureusement il y a aucune victime ». Mais il n’y a pas que le chantier de Cœur Défense qui est frappé. Celui de l’hôtel Pullman (Ex Sofitel) dans le tout nouveau quartier du Faubourg de l’Arche subit le même sort. L’une de ses deux grues s’écroule et vient briser des baraquements de chantier situés entre la ligne SNCF et la rue Michel Ange à Courbevoie.
La cinquième édition du Marché de Noël qui vient de s’achever le 24 décembre 1999 au soir est dévastée. Les petits chalets en bois ne sont plus que de simples morceaux donnant l’illusion d’un mikado géant. « A petit matin j’ai été réveillé par la tempête puis on m’a prévenu », confie Jean-Claude Meritte, le fondateur de Codecom, l’organisateur historique du village de Noël de La Défense. L’entrepreneur se rend immédiatement sur le parvis de La Défense et constate avec effroi l’étendue des dégâts. « On avait l’impression d’être après un bombardement. C’était un champ de ruines. Il ne restait plus rien. C’était vraiment le chaos, se souvient Jean-Claude Meritte. Heureusement une grande partie des exposants avait déjà enlevé leurs marchandises ». Puis après la catastrophe il a fallu tout nettoyer. « Ce n’était pas facile car tout le monde cherchait du personnel », poursuit Jean-Claude Merrite. Mais la tempête n’aura pas freiné les ambitions de Jean-Claude Merrite qui a dû racheter de nombreux petits chalets.
Les gratte-ciels de La Défense sont eux aussi saccagés. La tour W (ex Winterthur) voit bon nombre de ses vitres explosées. Des scènes similaires sont constatées à plusieurs autres endroits comme à la tour Total Coupole (alors nommée Total Fina Elf). Mais là les dommages sont bien plus importants. Une nacelle de nettoyage chute, transperce l’une des verrières de l’édifice et s’encastre dans son restaurant touchant par la même occasion la piscine située au niveau inférieur.
Cette matinée cauchemardesque Evelyne, une habitante de la résidence Boieldieu s’en souvient aussi. « Je me rappelle des vitres de la tour W qui tombaient. Heureusement que c’est arrivé à cette heure-ci et à cette période de l’année, sinon il y aurait eu des morts », lâche-t-elle. De sa tour Défense 2000 Thibeau, n’a rien oublié. « Les vitres de mon appartement bougeaient mais je n’étais pas inquiet », commente celui qui avait 18 ans à l’époque. Passé la tempête Thibeau, un amoureux inconditionnel de La Défense était alors allé voir l’étendue du sinistre.