À la SNCF, si un train peut en cacher un autre, une bonne nouvelle peu aussi en cacher une mauvaise. Alors que la ligne E du RER fonctionnera à pleine capacité dès le 15 décembre sur la nouvelle section incluant les gares de Nanterre-la-Folie, La Défense et Porte Maillot, il faudra attendre fin 2026 pour qu’elle atteigne sa destination finale, Mantes-la-Jolie, en reprenant l’une des branches de la ligne J du Transilien.

Sauf que non. La SNCF a reconnu que cet objectif -qui était à l’origine programmé pour la fin de cette année- ne sera pas tenu. L’exploitant de la ligne table désormais sur le début de l’année 2027. Mais là n’est pas vraiment le problème…

À cette période, un service « partiel » sera mis en place. Seules quelques rames circuleront chaque heure, au lieu des six prévues durant les périodes de pointe, dans chaque sens entre Mantes-la-Jolie et Rosa Parks, sur la ligne fonctionnant avec un système de recouvrement. Il faudra alors attendre la fin 2029 pour que la ligne atteigne son maximum. A cette période, les six trains du montois viendront s’ajouter aux seize en provenance de l’Est (Chelles – Gournay, Villiers-sur-Marne – Le Plessis-Trévise et Tournan) qui auront pour terminus dès ce 15 décembre Nanterre-la-Folie.

Et cette fois-ci, ce n’est pas le manque de matériel roulant qui est à l’origine de ce nouveau couac. Pour fonctionner pleinement, cette ligne repose sur plusieurs technologies. Couplé au système d’automatisation NExTEO, ATS+ (Automatic Train Supervision) doit permettre la coordination des 700 trains quotidiens prévus à terme sur la ligne, des 640 aiguillages et des quelque 700 signaux. Une technologie que l’entreprise ferroviaire a beaucoup de mal à déployer dans le secteur très dense de Mantes-la-Jolie.

La SNCF tempère cependant en précisant qu’en 2027, « l’offre sera identique » à celle actuellement en place sur la ligne J du Transilien entre les gares de Villennes-sur-Seine et Mantes-Station (soit sept gares). Les gares de Poissy et de Houilles – Carrières-sur-Seine continueront d’être desservies par le RER A, tandis que la gare de Mantes-la-Jolie le restera par la ligne J et la ligne N et celle d’Épône – Mézières également par la N.

Reste que cette nouvelle mésaventure pour Eole agace profondément Valérie Pécresse, la présidente de la région Île-de-France, qui a parlé d’un « choc » et d’« annonces inacceptables » venant de la SNCF. « Le RER E est très attendu par le Mantois, un territoire fragile économiquement », a-t-elle confié. Pour compenser le retard d’Eole, la présidente de la région indique avoir négocié avec sa voisine, la région Normandie, l’arrêt d’un TER supplémentaire à Mantes-la-Jolie en direction de Paris Saint-Lazare, qui avait été supprimé pendant la crise de la Covid-19. Cet arrêt est cofinancé par les deux régions.

Chiffré à 3,7 milliards d’euros, Eole a vu son budget exploser, notamment à cause de la pandémie, pour s’établir, aux dernières nouvelles, à 5,4 milliards d’euros. Un dérapage financier en partie comblé par la région Île-de-France. Mais cette fois-ci, Valérie Pécresse refuse de remettre la main au portefeuille. « Je suis en colère et j’ai perdu confiance dans les maîtres d’ouvrage. Les maîtres d’ouvrage m’avaient récemment affirmé qu’il s’agissait des derniers retards. Dorénavant, je ne paierai aucun nouveau surcoût pour ces projets », s’est-elle indignée.

Mauvaise nouvelle pour les voyageurs franciliens. Selon la radio France Bleu, le tarif mensuel du passe Navigo augmentera dès le 1er janvier 2025, passant de 86,40 euros à 88,80 euros, soit une hausse de 2,40 euros. Le tarif annuel du passe Navigo s’élèvera à 976,80 euros, représentant une augmentation de 26,40 euros. L’abonnement Imagine R connaîtra une majoration de 9,90 euros, atteignant 384,30 euros, tandis que le forfait annuel Imagine R Junior passera à 16,80 euros, contre 16,40 euros actuellement.

Cette nouvelle augmentation devrait être entérinée le 11 décembre prochain par les administrateurs d’Île-de-France Mobilités (IDFM). Elle s’inscrit dans le cadre de l’accord financier signé en septembre 2023 entre IDFM et l’État, qui prévoit une progression mesurée et régulière des tarifs jusqu’en 2031.

Depuis une décennie, le passe Navigo mensuel a connu plusieurs hausses. Après une stabilisation à 75,30 euros en 2018, son tarif avait fortement augmenté en 2022 pour atteindre 86,40 euros.

Attendu depuis plus de trente-cinq ans pour désaturer la ligne A du RER et ses quelque 1,3 million de voyageurs quotidiens, Eole va devenir une réalité dans quelques semaines. Pourtant, inaugurée il y a sept mois par l’ancien Premier ministre Gabriel Attal, l’extension du RER E avec ses trois nouvelles stations (Porte Maillot, La Défense et Nanterre-la-Folie) ne fonctionne toujours que très partiellement, et uniquement en heures creuses.

Désormais dotée d’un nombre suffisant de RER NG, le nouveau matériel roulant (trente-quatre rames sur les cent-trente attendues à terme), la nouvelle portion de la ligne va pouvoir prendre son rythme de croisière dès le dimanche 15 décembre. La ligne prolongée sera ainsi ouverte toute la journée de 5h30 jusqu’à environ 1 heure du matin. Un cadeau de Noël avant l’heure pour les franciliens souhaitant relier l’Ouest à l’Est (et vice-versa) de la région tout en faisant escale dans le quartier Haussmann et à la Gare du Nord.

Désormais, il sera possible de relier La Défense à Haussmann-Saint-Lazare en huit minutes (contre douze minutes en moyenne avec la ligne L) et la Gare du Nord en une dizaine de minutes (contre une trentaine de minutes avant l’ouverture d’Eole). Le RER E sera aussi une bonne alternative au RER A pour unir Val-de-Fontenay à La Défense avec un temps de trajet similaire.

Des gains de temps et surtout une désaturation de la plus ancienne ligne de RER qui réjouit Arnaud Bertrand, président de l’association Plus de Trains. « Ça va améliorer les trajets de nombreux usagers. Ce sera aussi bénéfique aux voyageurs du RER A, qui auront des trains moins chargés », confie Arnaud Bertrand, qui reste cependant vigilant quant à la gestion par la SNCF des reports de voyageurs en cas de gros problème sur le RER A.

Dès le 15 décembre, l’ensemble des trains du RER E en provenance de l’Est (Chelles – Gournay, Villiers-sur-Marne – Le Plessis-Trévise et Tournan) auront pour terminus Nanterre-la-Folie. Au total, dans le tronçon central de la ligne entre Nanterre-la-Folie et Rosa Parks, jusqu’à seize trains par heure circuleront aux heures de pointe, soit un train toutes les quatre minutes, et une dizaine de trains par heure aux heures creuses, soit un train toutes les six minutes.

« Le RER E sera désormais la ligne de RER la plus rapide d’Île-de-France, avec une vitesse pouvant atteindre 120 km/h dans le tronçon central. Ainsi, le RER E va transformer la mobilité de milliers de voyageurs », se félicite la SNCF, l’exploitant de la ligne.

Pour aller vers Mantes-la-Jolie, il faudra encore être patient. L’ultime extension, qui reprendra l’une des branches de la ligne J du Transilien, apportant dix gares supplémentaires au RER E, n’interviendra qu’à la fin 2026. Six trains par heure circuleront sur cette branche, contre près de seize pour les deux branches opposées.

Contrairement aux autres lignes de RER, celle d’Eole reposera sur un système de recouvrement. Concrètement, les trains en provenance de Mantes-la-Jolie auront tous pour terminus Rosa Parks, tandis que ceux des branches Chelles – Gournay et Tournan termineront leur course à Nanterre-la-Folie. Jusqu’à vingt-deux trains par heure circuleront sur le tronçon central en heures de pointe. La ligne bénéficiera également du système NExTEO, permettant d’optimiser au maximum la circulation des trains.

Avec cette nouvelle portion, Île-de-France Mobilités (IDFM) et la SNCF estiment que le nombre de voyageurs va pratiquement doubler, passant de 370 000 actuellement à 650 000 puis 700 000 lors du prolongement final à Mantes-la-Jolie. D’après les estimations d’IDFM, le fonctionnement à plein régime d’Eole permettra de faire baisser de 15 % le nombre de voyageurs du RER A entre Châtelet – Les Halles et La Défense, et de 12 % sur les RER B et D entre Châtelet – Les Halles et la Gare du Nord.

En attendant que le parc du RER E soit composé intégralement de RER NG, la ligne fera cohabiter pendant plusieurs mois trois types de matériels. En plus des RER NG, Eole fonctionnera avec les rames Francilien, qui seront réaffectées à terme vers d’autres lignes du Transilien, et les historiques MI2N, qui équipent la ligne depuis son ouverture en 1999. Ces dernières seront progressivement retirées de la circulation en fonction de l’arrivée des RER NG et connaîtront probablement un destin funeste, finissant à la casse.

Les horaires de la ligne sont à retrouver ici.