Le Racing 92 va se doter d’une seconde maison pour y jouer certains de ses matchs. Comme nous vous l’indiquions il y a quelques semaines, le club de rugby altoséquanais ambitionne de revenir à ses sources en construisant un nouveau stade au cœur du complexe sportif d’Yves-du-Manoir à Colombes, là même où se trouve le nouveau stade de hockey sur gazon.
Le club de rugby francilien, détenu depuis 2006 par Jacky Lorenzetti, avait quitté son antre de Colombes fin 2017 pour la Paris La Défense Arena, également propriété de l’homme d’affaires. Devenue un site incontournable pour les concerts -bien plus rentables financièrement-, la plus grande salle de spectacle d’Europe doit désormais jongler entre les rencontres de son club résident et les shows musicaux ainsi que d’autres événements en tout genre. Un véritable casse-tête calendaire. Si les propriétaires de la salle arrivent à faire s’imbriquer la plupart des dates, parfois cela coince, contraignant le Racing 92 à délocaliser ses confrontations, notamment à Créteil, et ces dernières années à Lens ou au Havre. Et cela ne devrait pas s’arranger…
« Une situation qui ne peut pas durer éternellement », reconnaît Jacky Lorenzetti. « Pour les matchs que l’on aura besoin de délocaliser on va revenir à Colombes », a déclaré l’homme d’affaires lors d’une réunion de présentation du projet. La solution est donc de faire revenir le club évoluant en Top 14 et en Champions Cup dans son berceau. Le propriétaire du club ambitionne d’ériger un nouveau stade au cœur de l’immense complexe sportif départemental de près de 170 000 mètres carrés. L’objectif sera d’y jouer une demi-douzaine de rencontres par saison, contre une bonne dizaine à la Paris La Défense Arena.
Conçu comme « un stade à l’anglaise » par l’atelier d’architecture AACL, ce complexe d’environ 14 000 places doit être érigé sur le terrain emblématique d’Yves-du-Manoir. La tribune historique, plus que centenaire, qui a vu passer deux olympiades, celles de 1924 et de 2024, sera conservée. À ces quelque 6 570 places existantes, vont venir s’ajouter trois nouvelles tribunes. Face au gradin d’origine, la tribune Est sera dotée de 3 900 places, tandis que la tribune Sud se composera de 2 180 places. La tribune Nord sera la plus petite, mais sûrement la plus animée avec, en son pied, une vaste bodega couverte de près de 900 mètres carrés, accompagnée d’une boutique d’environ 180 mètres carrés. Un pesage de 500 personnes offrira une vue directe sur le terrain. Enfin, à l’étage, prendront place les salons. L’ensemble du complexe sera accompagné de plusieurs buvettes pour abreuver et rassasier les supporteurs. Quant au terrain, il sera en pelouse synthétique, comme à la Paris La Défense Arena.
Pour accéder à l’enceinte, un grand parvis sera aménagé du côté de la rue Paul Bert, ce qui nécessitera la destruction d’une vielle bâtisse en très mauvais état. D’abord opposé, le maire de Colombes, Patrick Chaimovitch (EELV), est désormais partant. Très emballé à l’idée de voir revenir dans sa commune, pour certains matchs, le Racing 92, l’édile a lancé un petit tacle amical à son homologue de Nanterre. « Je ne veux pas être méchant avec Nanterre qui a le basket, mais je trouve que le rugby ne fonctionne pas bien à Nanterre, ce n’est pas assez populaire », s’est-il exprimé, se disant « très fier » de voir revenir le Racing 92 sur son territoire.
« L’emplacement est connecté à plusieurs lignes de bus et bientôt à l’extension du tramway T1, mais aussi à deux gares », précise Sophie Alard, la directrice maîtrise d’ouvrage de la société Ovalto, la maison-mère du Racing 92. En plus de l’autoroute A86 à proximité, le Racing 92 prévoit d’aménager un grand parking pour 1 000 emplacements de vélos.
Un stade dont les travaux sont estimés entre « 15 et 20 millions d’euros », financés « aux frais exclusifs du Racing 92 », affirme Jacky Lorenzetti. Attendu pour la fin de l’hiver, le permis de construire sera une étape clé, mais pas décisive. D’ici là, le Racing 92 va devoir trouver un accord financier d’occupation du site (sous forme d’AOT de très longue durée) avec le département des Hauts-de-Seine qui restera propriétaire des lieux. La collectivité avait lancé, à l’été dernier, un Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI) pour refaire vivre l’espace. Une consultation à laquelle seul le Racing 92 avait répondu. Si « rien n’est décidé aujourd’hui » selon le maire de Colombes, les travaux pourraient débuter, si tout va bien, à l’été 2025 avec comme ligne de mire des premiers matchs disputés pour la saison 2026/2027. Et Jacky Lorenzetti ne veut pas croire à un échec du projet. « Comme on est optimiste, notre plan B, c’est le plan A », sourit Jacky Lorenzetti martelant : « Notre volonté ferme, c’est Colombes ».
« Le stade officiel sera la Paris La Défense Arena. Le stade de Colombes nous permettra de jouer en cas de besoin sept, huit ou neuf matchs. On veut arrêter de trimbaler les joueurs, partenaires et supporteurs », a tenu à préciser Jacky Lorenzetti, qui est cependant resté évasif sur l’éventualité de donner un nouveau nom à son stade.
« Colombes fait partie du Racing 92. Nous aurons la chance d’avoir deux maisons », s’est pour sa part enthousiasmé Laurent Travers, le président et ancien entraîneur du Racing 92. « Il y aura une dynamique sportive pour Colombes », a-t-il ajouté.
Dans ce nouveau stade, il n’y aura pas qu’un Racing, mais deux. Le club de rugby des Hauts-de-Seine devrait partager sa pelouse avec le club de foot Racing Club de France (RC France), évoluant pour l’heure en National 3. Mais le futur stade et ses 14 000 places n’emballent pas vraiment Patrick Norbert et ses (très très grandes) ambitions pour son club de foot. « Ce n’est pas le stade rêvé pour nous. 14 000 places, c’est une jauge qui ne nous convient pas. Notre projet, c’est d’aller tout en haut », s’est offusqué Patrick Norbert, se disant tout de même « ravi de partager cet espace avec le rugby ».