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dimanche 24 novembre 2024
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Pour continuer de séduire, les tours de La Défense deviennent inclusives

Dans un contexte de réduction de l’empreinte immobilière des entreprises, le quartier d’affaires de l’Ouest parisien compte moins de transactions de grandes surfaces que dans le passé. Cependant, le changement de positionnement des propriétaires de tours visant à accueillir des utilisateurs plus modestes commence à porter ses fruits.

La donne a changé dans le plus grand quartier d’affaires européen. Historiquement portée par un marché de grandes surfaces, La Défense compte désormais davantage de petites transactions. Les propriétaires et gestionnaires d’actifs des gratte-ciels du quartier n’ont d’autre choix que de réinventer leurs offres pour rester attractifs.

Pendant des décennies, les tours de verre de La Défense n’ont eu d’yeux que pour les géants bancaires, les leaders de l’assurance et les plus grands cabinets d’audit. Concurrencée depuis une vingtaine d’années déjà par d’autres quartiers tertiaires de la région parisienne, La Défense semble avoir perdu de sa superbe.

La pandémie qu’a affrontée le monde il y a tout juste quatre ans a surtout rebattu les cartes. Les besoins des entreprises en surface de bureaux ont changé. La généralisation du télétravail pousse un grand nombre d’entreprises à réduire leurs surfaces de l’ordre de 20 à 30 %, et parfois plus…

Porté durant près de soixante ans par les grandes transactions, La Défense n’a enregistré l’année dernière que la signature de Suez dans Altiplano sur un peu plus de 20 000 mètres carrés. Et encore il s’agit là d’un mouvement endogène puisque la multinationale française spécialisée dans la gestion de l’eau et des déchets va quitter la tour CB21.

Face à ce bouleversement, les propriétaires et gestionnaires d’actifs changent leurs stratégies. Bien décidés autrefois à ne remplir leur building qu’à une ou deux entreprises, désormais ils ouvrent leurs portes à des utilisateurs bien plus modestes. Impensable il y a encore une petite décennie, Liberty Tower (l’ancienne tour CB16) n’hésite plus à louer des demi-plateaux.

Un positionnement inclusif à toutes tailles d’entreprises et tout secteur qui commence à porter ses fruits. « La division des immeubles fonctionne », analyse Olivier Taupin, à la tête du département Agence de Cushman & Wakefield France. En 2023, les transactions de moins de 5 000 mètres carrés ont été largement majoritaires que ce soit au sein d’immeubles neufs, restructurés ou plus anciens. « Tous les actifs sont devenus divisibles par plateau. Il y a un nouveau terrain de jeu qui n’existait pas auparavant », estime pour sa part Eric Siesse, directeur général adjoint et directeur du pôle bureaux location Île-de-France de BNP Paribas Real Estate. Une approche que salue Pierre-Yves Guice, le directeur de Paris La Défense : « C’est très bien, cela permet de diversifier les secteurs d’activités ».

Pour séduire de nouveaux résidents, La Défense se positionne essentiellement grâce à des loyers attractifs. Les loyers de première main ont chuté de 2 % en un an pour passer à 506 euros par mètre carré et par an, selon la dernière étude de Cushman & Wakefield. Pour la seconde main, la chute de l’offre est plus importante (6 %), passant désormais en moyenne à 402 euros. Le loyer prime, quant à lui, a augmenté de 2 % pour s’établir à 585 euros.

C’est donc avec les transactions inférieures à 10 000 mètres carrés que La Défense maintient la tête haute. Selon les derniers chiffres d’Immostats, la demande placée s’est ainsi établie à 133 500 mètres carrés à la fin de 2023, en recul de 33 % par rapport à 2022, bien loin du cru historique de 2016 où 278 000 mètres carrés avaient trouvé preneur.

Un peu moins d’une centaine de deals ont été signés en 2023. Le secteur du juridique, du conseil et de la formation privée a représenté huit transactions pour 26 800 mètres carrés, celui de la technologie, de l’information et la communication cinq transactions pour 9 900 mètres carrés tandis que celui de l’industrie de pointe quatre transaction avec 6 000 mètres carrés.

La demande placée en première main a représenté 63 300 mètres carrés, répartis sur dix-sept transactions, tandis que celle dite de seconde main a été majoritaire, avec 70 200 mètres carrés répartis sur quatre-vingt transactions.

Parmi les transactions, on retrouve notamment WTW avec près de 10 000 mètres carrés dans Hekla, les plus de 7 000 mètres carrés d’Emeria dans Aurore, et Smurfit Kappa pour environ 800 mètres carrés dans l’immeuble Watt.

Alors que La Défense peine à digérer ses mètres carrés inoccupés, les livraisons se poursuivent, à l’image des 76 000 mètres carrés d’Hekla inaugurés en décembre 2021. Cela a contribué à rendre le stock de bureaux vacant à La Défense conséquent, avec plus de 540 000 mètres carrés d’espaces. Avec un taux de vacance de 15,60 % aux derniers jours de 2023, il est resté stable par rapport à la fin de 2022, où il s’établissait à 15,50 %.

Actuellement, ce sont ainsi notamment plus de 20 000 mètres carrés qui sont disponibles dans Eqho, 53 000 dans Landscape, 13 000 mètres carrés dans Défense Plaza, 24 000 mètres carrés dans Emblem, 26 000 mètres carrés dans Légende (l’ancienne tour EDF) ou encore 24 000 mètres carrés dans Aurore sans les 17 000 mètres carrés d’Égée. Et d’ici un an viendra s’ajouter les 58 000 mètres carrés issus de la rénovation de la tour Adria, rebaptisée Hopen.

Ce n’est pas cette année que La Défense devrait retrouver une croissance record. « Il va y avoir une poursuite baissière du taux de vacance avec des deals qui ont principalement du mal à dépasser les 10 000 mètres carrés », estime Eric Siesse. La situation ne devrait pas s’arranger de sitôt. L’année prochaine, Mazars quittera en effet la tour Exaltis pour s’établir à Levallois. Par la suite, c’est TotalEnergies, l’un des plus gros utilisateurs du quartier d’affaires, qui dira au revoir à ses deux tours pour poser ses valises dans le nouveau complexe immobilier The Link. Deux gratte-ciels dont la compagnie pétrolière est aujourd’hui l’unique occupant mais aussi propriétaire.

Si les signatures de baux n’ont pas vraiment performé, les ventes et acquisitions d’actifs sont restés atones l’an passé dans un contexte économique d’inflation et de géopolitique instable. « Aujourd’hui, les investisseurs hésitent à aller sur le marché », indique Olivier Ambrosiali, directeur général adjoint en charge du pôle vente et investissement bureaux chez BNP Paribas Real Estate. Les fonds asiatiques, notamment Sud-coréens, qui avaient massivement investi en 2018 et 2019 en mettant la main sur plusieurs grandes tours du quartier comme Ariane, Majunga et CBX, ont calmé leurs appétits.

2024 devrait aussi être une année calme sur le front des investissements. « Je pense que le marché asiatique va revenir en France. Aujourd’hui, tout le monde se regarde pour savoir si c’est le moment opportun pour investir et si le fonds de la piscine a été touché », s’interroge Olivier Ambrosiali. Reste également à savoir si Primonial lancera son énorme projet Odyssey avant même de remplir sa tour Hopen et si Unibail-Rodamco-Westfield démarrera le chantier de ses tours Sisters.

La Défense en a vu passer des crises tout au long de son histoire. Soixantenaire, le quartier d’affaires a affronté les chocs pétroliers et les crises financières. Mais il faut le dire, la pandémie du Coronavirus a bouleversé les méthodes de travail et grandement accéléré le télétravail en entreprises. Si le travail à domicile reste encore très répandu dans les pays anglo-saxons (quoique de nombreuses firmes américaines reviennent dessus), en France, un salarié se rend en moyenne trois jours par semaine au bureau. Venir au sein de son entreprise pour travailler dans des bureaux alignés à l’infini dans des open-spaces sans âme ne fait franchement plus rêver. Les entreprises doivent donc désormais rendre les espaces de travail plus attrayants, conviviaux tout en les optimisant. Si la démarche a été entamée bien avant le Covid, la pandémie l’a accélérée. « La grande tendance aujourd’hui est à l’hybridation des usages. Tous les espaces doivent avoir plusieurs destinations », déclare Rémi Calvayrac, directeur du département Work Dynamics de JLL France.

Bien que l’année 2023 n’ait pas été particulièrement favorable pour le marché immobilier et que l’année 2024 ne s’annonce pas beaucoup plus encourageante, Paris La Défense continue d’embellir sa dalle et d’y apporter de la vie pour attirer de nouvelles entreprises. La transformation et la refonte des espaces publics entreprises par l’établissement il y a déjà une bonne dizaine d’années portent leurs fruits et sont saluées par l’ensemble des brokers. Un vaste projet que Paris La Défense entend poursuivre cette année avec le lancement de la végétalisation de l’esplanade. « Nous investissons très lourdement dans la qualité des espaces publics pour maintenir La Défense à son rang de vitrine française et internationale », assure Pierre-Yves Guice.

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